DMG PARIS DIDEROT: Revue de Presse

L´insuffisant rénal chronique protéinurique hypertendu: Objectifs de pression artérielle à la baisse!

Lv J and al. Effects of intensive blood pressure lowering on the progression of chronic kidney disease: a systematic review and meta-analysis. CMAJ. 2013 Aug 6;185(11):949-57.



Remarque: ce résumé d'article a été écrit par un étudiant ou un enseignant du DEPARTEMENT DE MEDECINE GENERALE DE PARIS 7. Il est en accès libre. La rédaction des résumés est faite dans le cadre de la REVUE DE PRESSE du DMG.

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Résumé de l'article

I. Introduction :

La maladie rénale chronique est fréquente en population générale, la baisse du Débit de Filtration Glomérulaire (DFG) survient de façon progressive et est éventuellement ponctuée d’aggravations aigues dans des circonstances particulières. Le contrôle de la pression artérielle (PA) pourrait ralentir l’évolution de l’insuffisance rénale chronique et diminuer le risque cardio-vasculaire. L’objectif de PA communément admis pour les insuffisants rénaux est de 130/80mmHg selon les données d’études observationnelles.

Les auteurs proposent une méta-analyse qui tente d’évaluer les effets d’une baisse intensive de la PA sur l’évolution de l’insuffisance rénale chronique et la survenue d’évènements cardio-vasculaires majeurs et enfin de mieux définir la balance bénéfice/risque des différents niveaux de contrôle de la PA.

II. Matériels et Méthodes

Les études pertinentes ont été identifiées à partir des bases de données MEDLINE, EMBASE et Cochrane Library. Seuls les essais contrôlés, randomisés et avec au moins un suivi de 6 mois ont été retenus. La recherche, l’évaluation et l’étude des données ont été faites par deux auteurs indépendants utilisant une approche standardisée. Les données sur les caractéristiques des patients, la PA cible dans chaque bras des études, le type d’anti hypertenseur utilisé, la durée du suivi, l’évolution des chiffres de PA systolique et diastolique constatée, la survenue des évènements et des effets indésirables ont été colligés.

Le critère primaire était composite : diminution de 50% du DFG ou doublement du taux de créatinine plasmatique. Les évènements cardio-vasculaires majeurs en fonction du groupe de randomisation et la survenue d’effets indésirables, lorsqu’ils étaient disponibles, étaient aussi relevés et constituaient les critères secondaires.

III. Résultats

11 essais contrôlés randomisés impliquant 9 287 patients insuffisants rénaux chroniques ont été sélectionnés. Cependant pour quatre d’entre eux, les moyens pour assurer l’aveugle du traitement ne sont pas décrits. Ces derniers n’ont donc pas été pris en compte pour l’analyse.

III.1 Critère primaire :

7 essais contrôlés randomisés ont été inclus impliquant 9287 patients ayant une maladie rénale chronique. Un total de 1264 évènements du critère principal a été retenu. Une baisse de 7.7mmHg de la PA systolique et de 4.9mmHg de la PA diastolique a été constatée par rapport au bras traitement standard. Un abaissement intensif de la PA était protecteur dans la survenue du critère primaire composite (HR=0.79 , 95% IC=0.67-0.93). Cependant une analyse plus précise en sous groupes montrait qu’une baisse intensive de la PA n’avait pas d’effet préventif sur le DFG des insuffisants rénaux sans protéinurie (HR=1.12 , 95%IC 0.67-1.87). En revanche, chez les patients insuffisants rénaux avec protéinurie, dans le groupe traité de manière intensive, la néphroprotection était significative (HR=0.73 , 95% IC=0.62-0.86).

III.2 Critères secondaires :
1- Evènements cardio-vasculaires majeurs

5 essais reportaient les évènements cardio-vasculaires majeurs représentant alors 5 308 patients. Etaient relevés 472 évènements cardio-vasculaires majeurs. L’analyse de ces essais ne parvient pas à prouver une diminution du nombre d’évènements cardio-vasculaires majeurs chez les patients insuffisants rénaux dont la PA était traitée intensivement par rapport au groupe contrôle.

2- Mortalité

De même pour ce critère secondaire, le traitement intensif de la PA chez l’insuffisant rénal chronique ne permettait pas de prouver un rôle protecteur dans la survenue du décès toutes causes confondues, ni même dans l’analyse en sous groupes de décès de cause cardio-vasculaire.

3- Effets indésirables

2 essais reportaient les effets indésirables en fonction du bras de traitement. Aucune différence n’a pu être mise en évidence selon que le traitement anti hypertenseur était intensif ou non.

III. Conclusion

Cette méta-analyse met donc en évidence l’effet protecteur d’une stratégie de baisse intensive de la PA dans la progression de la dégradation de la fonction rénale chez l’insuffisant rénal chronique initialement protéinurique. Les résultats apportés par cette étude ne parviennent pas à montrer un tel bénéfice chez l’insuffisant rénal chronique n’ayant pas de protéinurie. L’étude des évènements indésirables du bras traitement intensif de la PA par rapport au traitement standard ne montre pas de différence significative entre les deux groupes.


Commentaire

IV. Commentaire

Cet article répond bien à la question brute « Faut-il abaisser la pression artérielle plus sévèrement chez les insuffisants rénaux protéinuriques pour prévenir la dégradation de leur maladie rénale chronique ?» car il inclut des essais randomisés avec tous types d’anti hypertenseur (IEC, bétabloquant, inhibiteur calcique, diurétiques). De ce fait, il ne répond pas à la question de la classe thérapeutique la plus adaptée pour diminuer les chiffres de PA chez l’insuffisant rénal chronique. L’approche des auteurs, qui incluent des essais randomisés étudiant plusieurs classes d’antihypertenseurs, est plus proche de la vraie vie. Elle contourne le biais de savoir si c’est bien la baisse de la PA per se (par quelque moyen qui soit) qui est responsable de la prévention de la dégradation du DFG et non pas la molécule utilisée qui protège le rein par un autre mécanisme pharmacodynamique. Exemple des Inhibiteurs de l’Enzyme de Conversion qui diminuent le débit de protéinurie mais diminuent aussi la PA.

Enfin, les conclusions de cet article poussent, encore d’avantage, à rechercher bien sûr l’atteinte rénale chez les hypertendus mais aussi l’association d’une protéinurie qui pourrait faire reconsidérer la stratégie de prise en charge de l’HTA de ces patients, insuffisants rénaux protéinuriques, en modifiant leurs objectifs tensionnels.

Enfin, les auteurs de cette méta-analyse, en ne mentionnant pas de recommandations sur un objectif tensionnel chiffré, illustrent clairement leur objectif exclusif d’étayer les recommandations actuelles sur le traitement intensif de la PA chez l’insuffisant rénal chronique protéinurique.


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